Témoignage Esther et Matthias Chiwaya, Malawi
Alors que nous nous efforçons de nous rapprocher de Dieu et l’un de l’autre, nous rencontrons divers défis qui mettent à l’épreuve notre foi et notre résistance. Aujourd’hui, nous aimerions partager avec vous la fragilité de la vie dans notre pays, le Malawi, où chaque jour peut être un défi pour la survie. Le Malawi est continuellement classé parmi les pays les plus pauvres du monde. La pauvreté générationnelle est une réalité pour la plupart des habitants de notre pays.
Vous savez que dans l’histoire du chemin d’Emmaüs, trois personnes marchent ensemble sur la route. Les deux disciples marchent ensemble et se soutiennent mutuellement dans une situation qui semble désespérée. Puis Jésus les rejoint sur la route et leur donne de l’espoir et de l’inspiration. Aujourd’hui, la vie quotidienne des Equipiers au Malawi ressemble beaucoup à cela.
Le Malawi connaît la pauvreté depuis des générations et les récents événements mondiaux tels que la pandémie de COVID, l’inflation et le réchauffement climatique n’ont fait qu’exacerber la situation. À ces événements s’ajoutent les effets néfastes des récents cyclones, des inondations, d’une épidémie de choléra et des risques accrus pour la sécurité alimentaire. Face à l’ampleur de ces problèmes, il nous serait facile de perdre espoir. Nous nous accrochons à la conviction que Dieu ne nous laissera pas seuls en ces temps difficiles. Comme les disciples sur le chemin d’Emmaüs, nous marchons ensemble sur la route de l’avenir du Malawi, un pas après l’autre.
Permettez nous tout d’abord de vous donner quelques informations sur nous-mêmes et sur notre pays. Nous sommes Esther et Matthias Chiwaya. Nous vivons à Zomba, sur les hauts plateaux du sud du Malawi. Esther est enseignante et Matthias a récemment pris sa retraite d’un poste administratif à l’Université du Malawi. Nous avons quatre enfants, deux garçons et deux filles. Nous sommes membres des Équipes Notre-Dame depuis 11 ans. Nous avons commencé notre service en tant que couple responsable de la pré-région Malawi et Zambie en janvier 2023. Nous avons la chance d’avoir de bons emplois, mais ce n’est pas le cas de la plupart des équipiers au Malawi.
La réalité de la plupart des membres est très différente. Les couples des Équipes vivent pour la plupart dans des villages où le niveau d’éducation est faible et où la pauvreté est courante. La vie dans les villages est très fragile pour les membres des Équipes Notre-Dame. Les couples doivent s’entraider et se soutenir mutuellement pour survivre.
Le Fonds Monétaire International (FMI) classe le Malawi parmi les pays à faible revenu en situation de fragilité, ce qui souligne la vulnérabilité du pays. La récente dévaluation de 44 % de notre monnaie locale, par la Banque centrale du Malawi, fait suite à des dévaluations antérieures. Elle a eu un impact profond sur la vie des Malawiens, en particulier des plus pauvres. À mesure que la monnaie locale perd de sa valeur, les prix des produits de base montent en flèche. Cela représente un fardeau supplémentaire pour le pays, en particulier pour les pauvres qui vivent dans les villages.
Même si les gens ont un emploi, cela ne leur garantit pas la sécurité financière. Selon la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), le taux de pauvreté des travailleurs au Malawi est de 70,18 %, soit l’un des plus élevés d’Afrique.
Malgré les efforts du gouvernement pour mettre en oeuvre des stratégies de réduction de la pauvreté, celle-ci reste omniprésente au Malawi, touchant environ 76 % de la population. Le paysage économique actuel est marqué par des pressions inflationnistes sans précédent résultant de l’augmentation des prix mondiaux de produits de base essentiels tels que les engrais et les carburants, associées à un taux de change volatil et à des réserves de devises étrangères épuisées. La corruption est un problème important à tous les niveaux du gouvernement. La conséquence de tous ces facteurs est que la situation économique, déjà fragile, s’est considérablement aggravée. De nombreux Malawiens ont du mal à joindre les deux bouts.
Marcher en équipe et se soutenir mutuellement La vie des membres des équipes dans les villages est très difficile. Il y a beaucoup de questions pratiques pour lesquelles nous devons trouver une solution spécifiquement malawite.
• Comment partager un repas quand il n’y a pas grand-chose à partager, ou quand les connaissances en matière d’hygiène alimentaire de base font défaut ?
• Comment pouvons-nous nous réunir en équipe alors que les maisons sont à peine assez grandes pour nos propres familles et qu’il n’y a pas d’eau courante ni d’électricité ?
• Comment soutenir financièrement le Mouvement alors qu’il n’y a que très peu d’argent dans tout le village ?
Une réponse simple serait d’abandonner devant l’ampleur des défis, mais ce n’est pas notre façon de faire. Nous trouvons soutien et espoir en cheminant ensemble, et le Seigneur peut faire des merveilles. Les équipiers dans les villages ont travaillé dur pour améliorer leur propre vie et celle des autres dans leur village. Par exemple, lors des récentes inondations, les membres des END ont organisé des colis de soutien pour aider les victimes de la catastrophe. Ils ont également pu distribuer des dons provenant d’équipes d’autres pays, notamment de Grande-Bretagne et d’Irlande. Treize familles ayant perdu leur maison ont ainsi reçu des fonds pour aider à la reconstruction. De cette manière, les équipes ont p u éviter la bureaucratie et la corruption qui peuvent survenir lorsque les fonds sont distribués d’une autre manière. Les couples des END dans les villages qui ont si peu, ont été très efficaces pour aider les autres qui avaient encore moins.
Les membres des Equipes ont également réussi à dispenser des formations. Il s’agit bien sûr d’une formation sur les principes fondamentaux du Mouvement, mais aussi d’une formation sur les compétences nécessaires à la survie. Par exemple, lors de certains rassemblements de fin de semaine, les membres des Equipes ont reçu des instructions sur l’hygiène alimentaire, car il s’agit d’une cause fréquente de maladie et de décès.
Les membres des END ont également mis en commun leurs ressources afin d’apporter un soutien pratique pour sortir leurs villages de la pauvreté. À Mangochi, par exemple, certains membres ont pu mettre en commun leurs ressources pour élever des chèvres. Lorsque ces chèvres mettent bas, les petits sont partagés entre les équipiers. De cette manière, tout le monde a pu en profiter. Une équipe de Zomba possède un jardin d’environ un hectare qu’elle cultive ensemble. Lorsque les produits sont récoltés et vendus, les bénéfices sont reversés à l’équipe. Dans un autre village, les membres des équipes ont mis en commun le peu d’argent qu’ils possédaient pour créer une petite « banque villageoise » afin de se soutenir financièrement par le biais de petits prêts. Ces initiatives à petite échelle ont non seulement permis d’améliorer la vie de la communauté, mais aussi de développer des compétences en matière de gestion financière.
Lors des réunions d’équipe, nous devons prendre en compte la situation financière de chaque couple. Souvent, les membres n’ont pas les moyens de fournir de la nourriture pour les réunions d’équipe. Les couples apportent donc le peu de nourriture qu’ils ont et la partagent avec les autres membres. Ce sont des symboles importants de la manière dont nous pouvons nous soutenir et nous encourager mutuellement dans les difficultés de la vie.
Certains équipiers éprouvent des difficultés à participer aux rencontres de Secteur ou de Région, parce qu’ils doivent parcourir de longues distances. Bien sûr, vous pouvez vous demander pourquoi la distance est un tel problème dans un petit pays. Cependant, lorsque la seule option pour beaucoup est de marcher, les distances deviennent rapidement rédhibitoires. De nombreuses routes sont des pistes en terre, très poussiéreuses pendant la saison sèche et souvent impraticables pendant la saison des pluies. Nous sommes reconnaissants à nos conseillers spirituels, qui ont parfois accès à une camionnette utilitaire, de pouvoir nous transporter à l’arrière de celle-ci pour assister à des événements. Cependant, même avec cette aide, tous les membres des END ne peuvent pas se rendre aux événements. Certains doivent rester sur place pour protéger nos élevages, comme les poulets. Ces biens essentiels peuvent être volés s’ils sont laissés sans surveillance. Sans élevage, les couples risquent de ne pas avoir de nourriture et de ne rien pouvoir échanger contre d’autres biens essentiels à la vie.
Marcher ensemble, accompagnés par le Seigneur Jésus
Comme les disciples sur la route d’Emmaüs, nous avons besoin de l’aide de Jésus pour nous guider dans les moments où nous sommes fragiles. Pour nous, la pauvreté générationnelle n’est pas seulement une pauvreté physique, mais aussi une pauvreté de l’esprit. Après des générations de pauvreté, les gens peuvent perdre leur énergie, leur vitalité et leur espoir en l’avenir. Les membres des END ont besoin d’une nourriture spirituelle en plus de la nourriture pour nos estomacs.
Chaque réunion comporte des lectures bibliques, des échanges spirituels et des temps de prière. Les conseillers spirituels sont d’une aide inestimable pour nous guider, nous réconforter et nous connecter à une dimension au-delà du domaine matériel. Nous sommes également très reconnaissants à la Super-Région Transatlantique de produire des bulletins d’information contenant des conseils spirituels pour toute l’année. Réunies, toutes ces actions au sein des Équipes Notre-Dame donnent de la force aux couples, en particulier dans les moments où la foi faiblit.
Nous avons connu tant de catastrophes ces derniers temps que la foi des équipiers est souvent mise à l’épreuve. Nous sommes réconfortés par le fait que, comme les disciples sur la route d’Emmaüs, l’inspiration de Jésus et le soutien des compagnons de route locaux et internationaux nous aideront à traverser ces épreuves.